Le déplacement et l’Union Européenne – Il y a deux jours, Ursula Vonderlaan, a déclaré que les déplacés syriens resteraient au Liban pendant quelques années supplémentaires.

Le 4 mai 2024

Événements et significations :

Il y a deux jours, Ursula Vonderlaan, chef de la Commission européenne, a déclaré que les déplacés syriens resteraient au Liban pendant quelques années supplémentaires. En échange, elle a proposé de verser un milliard d’euros sur 4 ans. Cela implique qu’elle veut nous verser 250 millions d’euros chaque année où 2,2 millions de Syriens restent sur notre territoire. C’est comme si elle louait le Liban et son peuple pour 250 millions d’euros par an, soit un loyer de 2250 livres libanaises par mètre carré, ou une valeur de 14 000 livres libanaises par jour pour chaque Libanais. C’est une manière peu flatteuse de nous considérer !

C’est le montant s’ils s’engagent et versent la totalité, et si cette somme fait partie de la contribution annuelle de l’UE au LCRP – le programme de soutien aux déplacés au Liban – donc s’il s’agit d’un supplément, alors la contribution annuelle de l’UE au programme pourrait diminuer. Elle s’élève à 2,6 milliards sur 11 ans, soit une moyenne de 235 millions par an. Et c’est sans compter, bien sûr, les salaires des Libanais qui doivent faire des heures supplémentaires pour répondre aux exigences de l’UE, y compris la mission de l’armée libanaise de fermer la côte libanaise aux déplacés afin qu’ils n’émigrent pas vers l’Europe, selon le Premier ministre intérimaire Najib Mikati. Il a littéralement déclaré : “Le Liban apprécie la nouvelle position de l’UE qui consiste à soutenir les institutions militaires et de sécurité afin qu’elles puissent contrôler les frontières maritimes et terrestres et remplir leur mission de prévention de l’immigration illégale en provenance et à destination du Liban.”

De plus, le Président Mikati a évoqué un accord entre le Liban et l’Union européenne (ou l’intégration du Liban dans le droit européen) concernant l’immigration saisonnière des Libanais pour travailler dans les pays européens. La réalité de cette loi est que les pays européens, dans leur besoin de main-d’œuvre étrangère, délivrent des visas d’entrée sur leur territoire pour une période de 3 mois, renouvelable avec le consentement du pays d’accueil et de l’immigrant saisonnier, afin de pallier les pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs spécifiques. Par exemple, en Allemagne, dans le secteur médical et des soins infirmiers, en Espagne, en France et en Italie pour les saisons agricoles de récolte et autres… Cela représente un déplacement progressif et déguisé des Libanais sous le couvert de la migration saisonnière, qui pourrait conduire à une migration permanente (compte tenu des besoins des Libanais et des Européens).

En bref, quel est le sens et la raison de tout cela ?

Récemment, Chypre a observé une augmentation de la migration de déplacés syriens en provenance du Liban, par centaines, mais pas par milliers, et certainement pas par dizaines de milliers, ce qui suscite des inquiétudes.

Chypre, avec une superficie de 9 257 km² (légèrement plus petite que le Liban), compte une population chypriote d’environ 700 000 personnes (beaucoup plus petite que celle du Liban). Malgré cela, elle ne peut pas tolérer l’arrivée de quelques centaines ou milliers de Syriens déplacés. Récemment, nous avons renvoyé 107 d’entre eux il y a un mois. Le directeur du service de renseignement est venu nous demander de l’aide, me priant de ne pas interférer ni m’opposer et de comprendre la situation. Notre ami, le président de la République de Chypre, Nikos Christodulides, nous a également rendu visite. Il a alerté l’Union européenne : si le nombre de déplacés syriens passe de milliers à des dizaines de milliers (et non à un million et deux), Chypre tombera et l’Europe perdra l’une de ses 27 étoiles. Pour éviter cela, l’UE a préparé un programme d’aide au Liban (un milliard d’euros sur quatre ans) pour dissuader les déplacés syriens de se rendre à Chypre. Chypre mérite certainement un milliard d’euros, voire plus, pour être soutenue par l’UE.

La présidente de la Commission européenne nous a donc rendu visite avec un seul objectif :

L’Europe lutte contre l’immigration des Syriens vers ses pays, tandis qu’elle dit au Liban : “Vous devez garder les Syriens chez vous pendant que nous ouvrons nos portes à l’émigration de votre peuple. En d’autres termes, nous envisageons de remplacer la population libanaise par des réfugiés syriens, ce qui modifierait l’identité du peuple et du territoire, menant à la disparition du Liban dans quelques années.”

Aujourd’hui, notre réponse à l’Union européenne et au monde entier est que la terre et le peuple libanais ne sont ni à vendre ni à louer, que ce soit pour un milliard, cent milliards ou mille milliards, ni pour la migration saisonnière ni pour la migration permanente. Nous ne sommes pas à bon marché, notre dignité n’a pas de prix. Vous ne pouvez pas nous acheter, ni nous louer, ni nous soumettre, ni nous forcer !

Vous pouvez peut-être acheter ou faire travailler bénévolement certains de nos fonctionnaires, mais certainement pas notre peuple ni notre terre !

2- L’explication :

Pour ne pas être entièrement pessimiste et proposer des interprétations positives de ce qui s’est passé, ainsi que pour suivre le discours que nous avons entendu avant et après la visite concernant une nouvelle approche de l’UE et de la communauté internationale, je vais fournir quelques clarifications et ensuite demander des précisions.

Des points positifs :

  1. Pour la première fois, il est envisagé d’offrir des incitations pour encourager le retour volontaire de certains déplacés.
  2. Pour la première fois, on considère la différenciation entre les déplacés économiques et les déplacés sécuritaires/politiques.
  3. Cela démontre l’impact de la pression exercée par l’Europe, montrant ce qu’elle est capable de faire ! Et ce, après que le Liban l’ait intentionnellement et sérieusement mise sous pression !

D’un autre côté, parmi les aspects négatifs évidents, on peut noter :

  1. L’Union européenne continue de s’opposer au retour massif des Syriens déplacés, préférant le voir se dérouler de manière progressive.
  2. L’UE encourage le Liban à engager des gardes-frontières pour protéger ses propres frontières, comme l’a souligné M. Vonderlaan : “Il serait très bénéfique pour le Liban d’établir des accords de coopération avec l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, en particulier en ce qui concerne l’échange d’informations et la connaissance de la situation.”

Le communiqué de la délégation de l’UE précise : “Nous allouerons des fonds pour soutenir la gestion des frontières et de l’immigration, ainsi que pour renforcer le soutien aux forces armées libanaises.”

  • Le représentant du HCR au Liban, Ivo Frijnsen, a souligné que le fait que des personnes se déplacent fréquemment entre le Liban et la Syrie ne signifie pas qu’elles ne sont plus considérées comme des réfugiés.

De plus, les Occidentaux soutiennent que les Libanais devraient mettre de côté les frontières établies par l’accord Sykes-Picot et accepter les changements démographiques qui se profilent au Liban.

3- Les questions :

Voici quelques questions à poser aux responsables libanais, en particulier au premier ministre intérimaire, à titre d’information :

  1. Comment le milliard d’euros est-il réparti, notamment en ce qui concerne le soutien au programme de retour en Syrie ? C’est là l’aspect crucial. (Si la totalité du milliard est consacrée à encourager le retour, avec une allocation de 4000 euros par personne, seuls 250 000 Syriens pourront revenir, ce qui représente seulement 11 % de la population actuelle sur une période de 4 ans).
  2. Est-il exact que l’accord prévoit le rapatriement des personnes déplacées de Chypre, et que personne ne peut affirmer que ce n’est pas réalisable, étant donné que le commandant de l’armée, par une décision indépendante, a renvoyé 107 personnes déplacées ? Comment cela peut-il ne pas être une décision gouvernementale ? Si tel est le cas, l’accord inclut-il les Syriens et les Palestiniens qui pourraient arriver directement de Palestine ou de Syrie à Chypre et être renvoyés au Liban ? Comment saurons-nous leur origine ? Le Liban deviendrait-il un récepteur légitime de personnes déplacées en provenance de pays tiers en transit, et non seulement de celles originaires du Liban ?

En fin de compte, quel est l’intérêt de tout cela, et sommes-nous officiellement devenus un projet de migration saisonnière ? Quelle est la nouvelle approche et quelles sont les avancées positives ? Que devons-nous exactement à l’Europe ? Nous craignons réellement pour notre existence et notre identité, et nous n’avons reçu aucune réponse sur la manière dont les Syriens pourraient retourner rapidement dans leur pays.

4- Le véritable problème

Le vrai problème réside dans la gratitude constante envers les politiques étrangères qui nous nuisent, ainsi que dans la complète obéissance et mise en œuvre de ces politiques, même au détriment de l’intérêt et de l’existence du Liban ! OTV nous a rappelé aujourd’hui ce que j’avais dit le 9 mars 2012 : “Nous n’avons obtenu de l’étranger que le bateau et le visa !” J’en ai été témoin en 2011 jusqu’à ma sortie du gouvernement en 2020, tant à la table du gouvernement, dans les comités ministériels qu’au Parlement, et j’ai souvent tiré la sonnette d’alarme à ce sujet ! À maintes reprises, on m’a cité l’exemple de la Jordanie, qui a mis en place une politique de chaque dollar reçu par personne déplacée, un dollar devait être investi pour la Jordanie, et celui de la Turquie, qui a menacé l’Europe à plusieurs reprises en lui demandant 6 milliards d’euros et 4 milliards d’euros d’aide, sous peine d’afflux massif de réfugiés. Combien de fois avons-nous discuté du contrôle ou de l’interdiction de l’entrée et des camps dans la zone tampon à la frontière – No Man’s Land ? Nous n’avons pas besoin d’argent, car l’argent est destiné à maintenir les déplacés – nous avons besoin d’une décision politique libanaise pour les renvoyer ! Combien de fois ai-je exhorté les fonctionnaires à adopter une position libanaise ferme et à libérer quelques milliers de Syriens ? Vous verrez alors comment l’UE répondra aux demandes du Liban ! Ils se sont précipités vers nous pour quelques centaines de personnes ; imaginez ce que feront des milliers de Syriens ! Vous paraissez radins et acceptez un milliard d’euros ? Au lieu d’améliorer votre situation ? Aujourd’hui, au lieu de voir le Liban bloquer la mer, il l’ouvre, et observez comment les Européens paient des milliards pour revenir plutôt qu’un milliard pour rester. Ils allouent des milliards pour le retour des Syriens dans leur pays, surtout maintenant qu’ils reconnaissent l’existence de nombreuses zones sécurisées en Syrie !

En Syrie, il existe de vastes territoires, tant dans les zones contrôlées par le régime que dans celles contrôlées par l’opposition, qui peuvent accueillir tous les déplacés, permettant aux opposants de retourner dans les zones de l’opposition et aux partisans du régime de retourner dans les zones sous son contrôle.

(Ce milliard, s’il était entièrement utilisé pour faciliter le retour à raison de 4000 euros par personne, ne permettrait pas le rapatriement de plus de 250 000 déplacés, représentant ainsi seulement 11 % du total sur une période de quatre ans, ce qui est inacceptable !) De plus, ce milliard ne représente même pas une fraction du coût direct pour le Liban, estimé à plus de 55 milliards depuis 2011, soit environ 4,5 milliards par an, comparé aux 250 millions d’euros annuels alloués ! Il est impératif que le gouvernement et les fonctionnaires prennent une position ferme et agissent avec détermination pour faire entendre notre voix auprès de l’Europe. Des mesures doivent être prises ! Lorsque j’ai imposé des directives au ministère des Affaires étrangères concernant les employés du HCR, j’ai rencontré plus de résistance de la part des Libanais que des étrangers !

5- Exigences : Qu’est-ce qui est requis de nous ?

  1. Les municipalités sont tenues de mettre en œuvre les directives émises par le ministre de l’Intérieur et de suivre les recommandations formulées lors de la conférence du Courant pour les municipalités sur le déplacement. Nous sommes convaincus que cela produira des résultats concrets. À Batroun, nous nous engageons à montrer l’exemple en organisant une conférence réunissant les municipalités et les maires, dans le but de formuler des recommandations en coopération avec tous les acteurs impliqués et de commencer à les mettre en œuvre.
  2. Le gouvernement doit exécuter le plan de retour approuvé par lui-même ainsi que par le gouvernement précédent. Il doit simplement prendre des mesures légales contre toute personne violant les lois libanaises. De plus, l’armée devrait sécuriser les frontières terrestres avec la Syrie et maintenir les frontières maritimes ouvertes vers l’Europe, plutôt que de les fermer !
  3. Le Parlement devrait promulguer une loi obligeant le gouvernement libanais à expulser toute personne syrienne présente illégalement sur le territoire libanais. Nous, au sein du bloc, présenterons une proposition en ce sens… Cette législation est nécessaire. J’espère que le président de la commission de l’administration et de la justice, ainsi que toutes les commissions parlementaires, examineront les lois proposées par le bloc concernant les déplacements depuis 2018, ainsi que la première loi que j’ai proposée lorsque j’étais membre du Parlement libanais (régissant l’entrée des étrangers par une expulsion immédiate).
  4. Le gouvernement syrien devrait mettre en place des centres d’accueil pour les personnes déplacées, tandis que l’UE et le HCR devraient financer le retour des réfugiés économiques. Il est également impératif de lever le siège de la Syrie afin de faciliter sa reconstruction et le retour de son peuple.
  5. Le Courant patriotique doit affronter cette confrontation par tous les moyens légitimes, sans se préoccuper des questions de trahison, d’échec, de complicité ou d’encouragement du déplacement. Au contraire, il devrait lancer une invitation sincère à tous, même à ceux qui ont été en retrait, à participer et à s’unir pour contrer cette conspiration.

En conséquence,

  1. Nous formerons une délégation parlementaire pour rencontrer et exposer notre position au président du Parlement, au Premier ministre intérimaire et au ministre des Affaires étrangères.
  2. Nous nous rendrons à l’ambassade de l’UE pour obtenir des informations et présenter une note écrite, ainsi qu’au siège de l’UE à Bruxelles et au Parlement européen à Strasbourg.
  3. Nous entreprendrons des actions municipales, de jeunesse, populaires et régionales, en commençant par l’Union européenne le jour de sa fête, le 9 mai, afin de faire passer le message nécessaire.

Tout cela dans un esprit d’amitié et d’amour envers le peuple syrien, sans porter atteinte à sa dignité ni à son humanité, et également pour affirmer que le Liban n’est pas à vendre ! Le Liban appartient aux Libanais, à tous les Libanais, et à personne d’autre.

Le Liban n’est pas à vendre ; le Liban est pour les Libanais.

Merci