Les emails de John Podesta n’en finissent pas de sortir de WikiLeaks. Comme Haaretz le note platement, « beaucoup des emails ayant fuité de la campagne Clinton concernent Israël. »
Oui: les emails démontrent la centralité d’Israël comme thème pour la clique des Clinton, ainsi que l’agonie qu’ils ont traversé du fait de l’accord iranien du Président Obama. La semaine dernière, nous avions dévoilé les emails témoignant de la réactivité épidermique de l’équipe Clinton aux injonctions du méga-donateur Haim Saban: Clinton ne doit pas « réprimander » Netanyahou pour son opposition à Obama sur l’accord mais envoyer des signaux positifs à Israël, y compris par une opposition au mouvement Boycott, Désinvestissements et Sanctions (BDS) – des déclarations pouvant par la suite être transmises à des «milliers » de donateurs afin de les aider à comprendre où se situe Hillary vis-à-vis d’Israël.
Les emails continuent d’arriver et, au cours de la journée passée, des publications israéliennes ont réagi à un commentaire de Clinton approuvant l’idée d’un « processus de paix à la Potemkine ».
Voici le contexte. Dans un email de mars 2015 juste après la victoire de Netanyahou aux élections israéliennes, Jake Sullivan, assistant de Clinton sur la politique étrangère transférait un article du Times dans lequel Netanyahou présentait de tièdes excuses pour son avertissement raciste la veille du scrutin, où il avait prévenu les électeurs juifs que les Palestiniens allaient venir aux urnes « en masse», et renchéri sur sa promesse qu’aucun état palestinien ne verrait le jour tant qu’il serait au pouvoir. Via le Times:
((La solution à deux états « demeure notre objectif aujourd’hui, car c’est le seul moyen de garantir l’avenir d’Israël comme état juif et démocratique, » a-t-il ajouté [Netanyahou].))
Sullivan remarque:
((Sans surprise, Bibi le Pragmatique fait son apparition.))
Clinton en profite:
((C’est une ouverture que nous devrions exploiter. Un processus Potemkine est toujours mieux que rien.))
Un procédé Potemkine, c’est précisément ce qu’ont connu les États-Unis depuis une vingtaine d’années. C’est notre contribution à la gestion du conflit entrepris par les Israéliens; nous ne leur mettons jamais vraiment la pression, et pourtant, l’affirmation du processus Potemkine offre aux USA l’excuse de prétendre travailler dur à l’avènement d’une solution à deux états. Alors que l’apartheid s’intensifie à travers la Cisjordanie et Jérusalem-Est.
La référence à une « ouverture » de la part de Clinton n’est pas claire. Netanyahou n’était évidemment pas sincère à propos d’un état palestinien; depuis plusieurs années il en parle du bout des lèvres tout en étendant le contrôle israélien sur les territoires. Clinton évoque un billet de Jodi Rudoren dans le Times où l’ancien chef de bureau de Jérusalem déclare que Netanyahou « croit au concept de deux états mais pense que les circonstances présentes le rendent impossible – [et ceci] reflète une opinion très répandue parmi les Juifs d’Israël. » C’est-à-dire, jamais.
Michael Omer-Man a ce commentaire courroucé à propos du processus Potemkine chez +972:
((Il est difficile de concevoir déclaration plus troublante au sujet d’Israël et de la Palestine de la part d’une politicienne qui, en toute probabilité, sera la prochaine Présidente des États-Unis, même si cela ne représente qu’une partie de sa pensée sur la région…
Quand des politiciens US comme Hillary Clinton disent qu’un semblant de processus de paix vaut mieux que pas de processus, ils entendent que c’est meilleur pour les intérêts des États-Unis et d’Israël, pas pour ceux des Palestiniens. Un processus Potemkine implique explicitement le maintien du statu quo de l’occupation et de l’oppression, tout en neutralisant toutes les conséquences auxquelles Israël pourrait être exposé par ses actes.))
La déclaration de Clinton à propos d’un procédé Potemkine semble être un écho de ses conseils donnés dans un discours à Goldman-Sachs en 2013 – également dévoilé dans les emails Podesta – selon lesquels les dirigeants ont à la fois besoin d’une position publique et d’une position privée sur les thèmes difficiles.
(( Vous avez juste besoin de comprendre, en quelque sorte… comment équilibrer les efforts publics et privés qui sont indispensables pour réussir, politiquement, et je ne parle pas seulement d’aujourd’hui. C’est une chose, je crois, qui a sûrement été vraie pendant toute notre histoire, et si vous avez vu le film de Spielberg, « Lincoln », et comment il manœuvrait et travaillait pour faire passer le 13ème Amendement, qu’il a appelé l’un de mes prédécesseurs préférés, le Secrétaire Seward, qui avait été le gouverneur et sénateur de New York, avait concouru contre Lincoln à la présidence, et il a dit à Seward, j’ai besoin de votre aide pour réaliser cette chose. Et Seward appela quelques-uns de ses amis lobbyistes qui savaient comment conclure un marché, et ils s’y sont attelés sans relâche. En fait, la politique c’est comme la fabrication de saucisses. C’est repoussant et ça l’a toujours été, mais nous aboutissons généralement où nous avons besoin d’arriver. Mais si tout le monde regarde, vous savez, les discussions et les accords en coulisses, vous savez, alors les gens commencent à devenir un petit peu nerveux, pour ainsi dire. Donc, vous avez besoin à la fois d’une position publique, et d’une position privée.))
Mais dans le cas présent, les pressions en coulisses sur Netanyahou sont aussi pathétiques que les déclarations publiques. Il ne se passe rien.
Enfin, un thème récurrent dans les emails concerne les donateurs juifs pro-Israël. C’est pourquoi l’équipe Clinton ne veut rien faire qui puisse heurter Netanyahou. Et parlant du lobby israélien, voici un email daté de cette année de Neera Tanden, directrice du Clintonite Center for American Progress, accueillant au conseil d’administration du CAP Jonathan Lavine, partenaire co-directeur de Bain Capital. Lavine est un supporter zélé d’Israël. Depuis les Philanthropies Juives Combinées de Boston:
((Pendant des décennies, Jonathan et son épouse Jeannie ont… ces dernières années augmenté focalisé [sic] leurs investissements en Israël, et dans l’avenir juif. Jonathan affirme que son expérience lors d’une mission des PJC en Israël en 2012 lui a ouvert les yeux « sur la nature variée du travail des PJC, et sur la façon dont nous pouvons poursuivre notre désir de changement social et exprimer notre identité juive.)