La présidentielle française au Liban

Les Français votaient dimanche sous haute surveillance en raison des craintes d’attentats, pour le premier tour d’une élection présidentielle à l’issue totalement imprévisible et cruciale pour l’avenir de l’Union européenne.

Au Liban, 17.800 Français (dont 77% de binationaux, en majorité Franco-Libanais) étaient inscrits sur les listes électorales, selon la responsable de la communication de l’ambassade de France au Liban, Nour Akl.

Vers midi, il y avait encore foule au consulat de France à Beyrouth et au Lycée français situé à proximité, où les électeurs sont venus pour glisser leur bulletin.

“A vue de nez, j’ai l’impression que beaucoup de gens qui ne s’étaient pas déplacés la dernière fois viennent voter aujourd’hui”, affirme Matthieu.

Yann, un Français de 21 ans, raconte que c’est la deuxième élection à laquelle il participe. “Je pensais voir plus d’expatriés, mais en fait, il y a énormément de Franco-Libanais”, dit-il.

“Je vais voter Marine Le Pen”

Sur les onze candidats en lice, un quatuor de favoris se détache, mené par le jeune centriste Emmanuel Macron et la candidate d’extrême droite Marine Le Pen, au coude à coude. Ils sont talonnés de près par le conservateur François Fillon et le tribun de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon. Vient ensuite le candidat du Parti socialiste, Benoît Hamon, qui peine, selon les sondages, à franchir le cap des 10% d’intentions de vote.

Les bureaux de vote ont ouvert à 06h00 GMT et les derniers fermeront leurs portes à 18h00 GMT. Sur les quelques 47 millions d’électeurs, plus d’un quart s’avouaient encore indécis à la veille du vote et la participation constituera un enjeu clé du scrutin.

“Je vais voter Marine Le Pen”, confie Sophie, une Franco-Libanaise de 43 ans, qui s’est rendue au Lycée français de Beyrouth. Sans motiver son choix, elle raconte qu’elle vote Front national “depuis plus de 20 ans”, sans pour autant avoir la carte du parti.

“J’hésite encore entre Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon, mais ce dernier me gêne sur son programme européen, même si j’aime beaucoup ses idées”, confie pour sa part Adrien, un Franco-Italien de 20 ans, alors même qu’il est sur le point de voter au consulat.

Émile, Franco-Libanais de 48 ans, est venu accompagné de ses deux filles jumelles, Romy et Raquel, 20 ans.

“J’ai voté pour quatre présidents déjà. Je vote pour la France”, a confié le père.
“Comme première expérience de vote c’était facile, on savait pour qui voter et nous étions sûrs”, ont pour leur part confié Romy et Raquel. Cette famille a tenu à garder son vote secret.

“L’administration est trop conciliante avec les Arabes”

Françoise, 69 ans, et son mari Jean, tous deux Franco-Libanais, ne votent pas pour le même candidat.

“C’est un devoir de voter même si nous avons des opinions différentes mon mari et moi, c’est la démocratie”, confie Françoise. Son vote ira pour le jeune centriste Emmanuel Macron, à la tête du mouvement En Marche! Son époux n’a pas précisé pour qui il votera.

Pour Pascale, quadragénaire française, “l’administration (française) est trop conciliante avec les Arabes”. “Au vu des sondages et de ma conviction, mon vote devrait être le bon”, ajoute-t-elle, sans préciser pour qui elle compte donner sa voix.

“Macron, pour un vote utile”

Mario, Franco-Libanais de 35 ans, est décidé : “Nous ne sommes pas d’accord, mon épouse et moi. Je vais voter Macron pour un vote utile et elle va voter à gauche pour ses opinions, pour un vote partisan”. Et d’ajouter : “Je votais Fillon avant, mais après les affaires, j’ai changé d’avis”.

Lama, Franco-Libanaise de 32 ans venue voter avec son mari et son enfant, compte, elle, soutenir le candidat de la droite. “Je vois beaucoup plus de monde pour cette élection, car les gens sont dans le doute, et je vais voter François Fillon”, dit-elle, affirmant que ce dernier a toujours ses chances de se qualifier au second tour.

Véronique, 53 ans, Franco-Libanaise de 53 ans, votera également Fillon : “J’ai senti un revirement chez mes amis et mes collègues, vers Macron après le Penelope Gate”, reconnaît-t-elle, en allusion aux révélations de presse sur des emplois fictifs présumés au profit de l’épouse de M. Fillon, Penelope, et de deux de ses cinq enfants. Au final, ces révélations ont débouché sur une inculpation pour “détournement de fonds publics”.

Joseph, Français de 67 ans, ne veut pas révéler pour qui il a voté : “De tous les thèmes, la laïcité est celui qui me préoccupe le plus dans mon vote”, se contente-t-il de dire.

Sur Twitter, le leader druze libanais Walid Joumblatt a réagi en affirmant : “Si Marine Le Pen remporte l’élection présidentielle en France, le spectre du nationalisme et du fascisme menacera l’unité et l’avenir de l’Europe. Aujourd’hui, est un jour décisif pour l’humanité”.