Une jeune Libanaise décroche un précieux ticket pour parler développement durable à l’Onu

Rind el-Hage, 18 ans, étudiante en première année de génie civil à l’Esib. Photo DR

Dans un peu plus d’un mois, l’Assemblée générale des Nations unies s’apprête à écouter une poignée d’étudiants venus des quatre coins de la planète pour présenter un plan d’action sur le développement durable, afin de répondre aux 17 objectifs fixés par l’Onu à l’horizon 2030. Parmi ces étudiants figure pour la première fois une Libanaise: Rind el-Hage, une ingénieure en herbe de 18 ans.

Cette étudiante en première année de génie civil à l’Esib (USJ) a décroché sa place après avoir remporté le concours international de dissertation Many Languages, One World, le 27 mai dernier. Cette compétition aborde la question du multilinguisme et son impact sur le développement durable, notamment à travers le rôle des «citoyens du monde». Sur les 3600 participants (originaires de 165 pays) à cette troisième édition de la compétition organisée par le centre d’apprentissage de l’anglais ELS Educational services, inc. et le programme Academic Impact de l’Onu (UNAI), seuls 10 étudiants ont été sélectionnés.

Avant de se présenter devant l’Onu, Rind el-Hage et ses camarades participeront au Forum mondial de la jeunesse 2016 qui se tiendra du 25 au 31 juillet 2016 à la Hofstra University à Hempstead, New York, où ils élaboreront leur plan d’action.

«J’étais comblée de joie en apprenant ma sélection », raconte à L’Orient-Le Jour la jeune femme originaire de Baskinta. «J’ai mis du temps à réaliser ce qui s’est passé, puis j’ai été envahie par un sentiment de grande fierté», ajoute-t-elle.
«C’est la célèbre phrase “Hi, kifik, ça va ?” qui m’a fait réfléchir au multilinguisme au Liban», se rappelle-t-elle, en référence au fameux «Bonjour, comment vas-tu?» une simple phrase comportant les trois langues les plus parlées au Liban: l’arabe, le français et l’anglais. «Ce multilinguisme passe presque inaperçu au Liban, tellement on le pratique, explique-t-elle. Je voulais donc me pencher sur les effets positifs de cette diversité linguistique et la montrer aux étrangers, à travers l’exemple de mon pays.»

« Une autre langue, une autre vision du monde »

Car le concours de dissertation Many Language One World aborde les questions de citoyenneté mondiale et de compréhension culturelle, sous l’angle du multilinguisme.
«On dit en anglais qu’une autre langue apporte une autre vision du monde », dit Rind el-Hage. «Cela nous permet de nous éloigner du racisme et des stéréotypes, en étant plus ouverts aux autres », estime-t-elle. «Certes, le Liban a encore un long chemin à faire à ce niveau, mais comparé aux voisins arabes, notre pays est probablement plus ouvert d’esprit et la possibilité de dialoguer y est plus présente», poursuit-elle.
Le fait d’être trilingue n’a pas dispensé la future ingénieure d’un sérieux travail de préparation: «J’ai beaucoup lu, notamment l’un des ouvrages de l’écrivain libanais Fouad Ephrem Boustany dans lequel il évoque l’influence linguistique italienne sur le Liban au temps de l’émir Fakhreddine», raconte l’étudiante.

« Le multilinguisme, ça marche vraiment »

À travers son travail, Rind el-Hage souhaite transmettre un message : « Je veux dire que le multilinguisme, ça marche vraiment, et le Liban en est un exemple. Je veux montrer une autre image de mon pays, loin des idées reçues.»
«Il y a beaucoup d’idée innovantes au Liban qui ne trouvent pas d’écho auprès des dirigeants, poursuit-elle, mais il y a des progrès sensibles: l’énergie solaire se développe, les initiatives citoyennes aussi, surtout depuis la dernière crise des déchets. On sent que les Libanais sont motivés.»
Ce ne sont pas les idées qui manquent à cette étudiante enthousiaste: elle formule des propositions modestes, mais qui pourraient avoir une empreinte positive sur l’environnement, au centre du développement durable, notamment à travers l’objectif 11: «Cités et communautés durables». «Dans le domaine de la construction, il est possible de réaliser de petits changements qui auront un impact considérable. La durée de vie d’un bâtiment tourne généralement autour de cent ans. Si l’on améliore l’isolation de l’édifice, sa luminosité, son système de chauffage, de façon à réduire la consommation énergétique, cela, sur un siècle, peut faire la différence. Et les changements ne sont pas difficiles à réaliser», assure-t-elle.

Rind el-Hage se réjouit de pouvoir travailler avec des étudiants étrangers à New York, dont certains sont déjà détenteurs de master ou même doctorants : «Travailler avec des personnes de différentes nationalités montre que les problèmes que nous abordons sont mondiaux et que les solutions à ces problèmes doivent répondre aux exigences des différents pays», dit-elle.
Quant au développement de son pays natal, Rind el-Hage souhaite y contribuer au niveau des ressources hydrauliques. «Ces ressources sont abondantes au Liban, mais l’on souffre toujours de pénuries», se désole-t-elle. C’est pourquoi elle souhaite se spécialiser dans le domaine de l’eau et de l’environnement. «Pourquoi pas un master en énergies renouvelables», lance-t-elle.
Et aux jeunes de son âge, Rind el-Hage dit: «Ayez confiance en vos capacités et donnez une belle image de votre pays!»