Mika se confie sur son enfance et la prise en otage de son père

© GUILLAUME SOUVANT

Le chanteur avait 8 ans quand son père a été retenu en otage pendant 8 mois pendant la guerre du Golfe. « On a tout perdu… », raconte-t-il dans « Le Monde ».

L’enfance de Mika n’a pas été un long fleuve tranquille… Dans Le Monde, l’artiste est revenu sur un épisode dramatique qui a bouleversé l’équilibre familial dans les années 1990. À l’époque, Mika a 8 ans, sa famille a fui le Liban en guerre il y a plusieurs années pour s’installer à Paris. Son père, d’origine américaine, est banquier, gros bosseur souvent absent. Il se retrouve alors envoyé en voyage d’affaires au Koweït, quand la guerre du Golfe éclate. « Il s’est trouvé pris dans l’invasion du Koweït par Saddam Hussein, pendant la première guerre du Golfe, et a été retenu à l’ambassade américaine pendant huit mois. » Une prise d’otages longue et stressante pour toute la famille : l’attente, l’angoisse, la chasse aux infos sur CNN… « Nous n’avions pas de contact, juste un fax de temps en temps, poursuit Mika. La stabilité qu’on connaissait avec mes sœurs s’est alors écroulée… »

Lorsque son père est enfin libéré, rien n’est comme avant. Il est vivant, mais profondément marqué. « Quand mon père est revenu, barbu, amaigri, ses yeux étaient différents, explique Mika au Monde. On ne l’a plus appelé “papa” mais “Mike”, je ne sais pas pourquoi. Après le traumatisme qu’il avait vécu, il a eu du mal, il a été licencié. On a tout perdu. » Commence alors le long ballet des huissiers qui viennent frapper à la porte de l’appartement parisien. Le jeune Mika fait souvent l’interface à travers la porte, avec toujours le même message : les parents sont partis, revenez plus tard… « J’ai appris à gérer les huissiers : quand ils sonnent, dire qu’il n’y a pas d’adultes à la maison, qu’on ne peut pas ouvrir parce qu’on ne les connaît pas. Mais à la quatrième visite, je les ai vus tout prendre chez nous, moi assis sur le canapé rouge. Je ne pardonnerai jamais à un système qui permet ça. Cette invasion dans ce qui est sacré, la maison. Cette punition injustifiée… »

Ruine et dépression

Son père s’enfonce dans la dépression, l’argent manque, la famille quitte alors la France pour la Grande-Bretagne. « Un soir, on s’est entassés dans la Toyota Previa et on est partis à Londres », se souvient l’artiste qui reconnaît que le rebond a été possible grâce à la détermination de sa mère. Mika se referme sur lui-même, sombre dans la mélancolie et va jusqu’à perdre la parole. Dans de multiples interviews, il a raconté comment, à cette époque, il devient la cible de ses camarades, en raison de sa différence et de son mutisme. Harcèlement, insultes, brimades… « Ils m’appelaient le Libanais, le pédé, expliquait-il récemment dans une interview sur France 4. Pas seulement avec des mots, mais aussi avec des trucs : avec des objets, des canettes, des cailloux, que je recevais dans la tête. J’aimerais bien dire que je n’ai pas de cicatrices de cette période de ma vie, mais ce serait un mensonge… »

Mika s’isole encore plus, s’enferme dans sa bulle et cache la situation à ses parents, par « honte », dira-t-il plus tard. Sa scolarité vire au désastre. C’est sa mère, encore une fois, qui trouvera la parade : elle engagera une professeure russe qui lui donne des cours de chant à la maison qui finiront par le débloquer. La musique sera son dérivatif et sa planche de salut. Avec le succès que l’on sait.