Paris en prince pour MBS et ses contrats

Mohammed ben Salmane, le 7 mars à Londres.  Photo Tolga Akmen. AFP

L’héritier du trône d’Arabie Saoudite à l’ascension fulgurante est arrivé dimanche en France. Derrière l’annonce d’un «partenariat stratégique» et commercial entre les deux pays, plusieurs dossiers chauds (guerre au Yémen, Iran, Syrie, Liban) seront abordés

Parisen prince pour MBS et ses contrats

Il épate autant qu’il intrigue ou effraie. Le turbulent prince héritier d’Arabie Saoudite, Mohammed ben Salmane, 32 ans, est en visite en France lundi et mardi. Il doit dîner mardi soir avec Emmanuel Macron à l’Elysée où l’on indique qu’il n’y aura pas de signature de grands contrats, comme on en a l’habitude dans les sommets franco-saoudiens. Les diplomates des deux côtés mettent en avant «un partenariat stratégique» entre Riyad et Paris. Une «nouvelle vision», selon l’expression mise en avant par l’Elysée, qui doit plaire à Mohammed ben Salmane qui a lancé «Vision 2030», cette réforme globale et profonde de l’Arabie Saoudite de l’après-pétrole.

Trump

Le jeune prince dont l’ascension fulgurante s’est faite à coups de force et d’éclat à l’intérieur comme à l’extérieur de son pays réussit à imposer son style et son tempo, y compris à ses partenaires internationaux. A Paris, comme l’ont souhaité les Saoudiens, l’accent sera mis sur la culture, le tourisme, les investissements d’avenir et les nouvelles technologies. Le grand accord de coopération qui sera annoncé concerne le développement du gigantesque site archéologique et touristique d’Al Ula, dans le nord-ouest du royaume. Les dossiers chauds de la guerre au Yémen, mais aussi de l’Iran, de la Syrie ou encore du Liban, feront l’objet de discussions délicates, compte tenu des différences de points de vue entre Riyad et Paris.

C’est d’ailleurs dans un contexte de crise qu’Emmanuel Macron avait rencontré la première fois MBS au cours d’une escale surprise (et tendue) à l’aéroport de Riyad en novembre 2017 au sujet du Premier ministre libanais Saad Hariri. Celui-ci avait été «convoqué» à Riyad et forcé de présenter sa démission du gouvernement en direct d’un studio de télévision saoudienne. En obtenant son retour à Beyrouth, via Paris, le président français avait réussi un «joli coup diplomatique», selon l’expression des milieux concernés. Mais la prétention de la France à vouloir jouer un rôle dans les crises du Moyen-Orient semble difficile à faire valoir face à MBS qui privilégie clairement les relations de plus en plus étroites avec l’administration de Donald Trump.

Le prince héritier arrive à Paris justement en provenance des Etats-Unis où il vient de passer pas moins de trois semaines à sillonner le pays d’est en ouest pour des rencontres officielles à la Maison Blanche, mais aussi avec des entreprises de technologie à la Silicon Valley ou avec des financiers de Wall Street. Il a signé notamment des contrats d’armes de plus d’un milliard de dollars… à des années-lumière des 350 milliards dont il avait été question l’année dernière lors de la visite de Trump à Riyad. Déception également à New York où l’on espérait l’entrée en Bourse du groupe pétrolier saoudien Aramco, présentée comme l’introduction du siècle, la cotation d’Aramco pourrait finalement s’effectuer uniquement à Riyad.

Tapis rouge

L’étape française de MBS s’inscrit dans une grande tournée des «alliés et partenaires les plus proches» du Royaume, indique une source diplomatique saoudienne. Une conquête d’une stature internationale qui l’a mené depuis début mars en Egypte puis au Royaume-Uni, aux Etats-Unis et maintenant en France, avant l’Espagne. Le tapis rouge déroulé dans différentes capitales sous les pieds de celui qui mène une guerre meurtrière au Yémen a provoqué les critiques des ONG humanitaires. Réformateur ou imposteur ? Mohammed ben Salmane doit faire valoir quelques résultats positifs après son grand chambardement.