Les propos du ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, mercredi au sujet du « comportement provocateur du Liban » sur le dossier de l’exploration d’hydrocarbures offshore ont surpris de par leur véhémence la classe politique libanaise, alors que les autorités ont saisi l’ONU.
« (Les autorités libanaises) ont lancé un appel d’offres pour un champ gazier, notamment un bloc qui de toute évidence est à nous », a déclaré M. Lieberman mercredi. « Nous voyons là un comportement provocateur », a-t-il affirmé. Il a d’autre part jugé que les « groupes (pétroliers) internationaux, des compagnies respectables, étaient en train de commettre une grave erreur » en répondant aux appels d’offres au Liban.
En décembre, le gouvernement libanais avait approuvé une offre présentée par un consortium formé par le groupe pétrolier français Total, l’italien ENI et le russe Novatek, pour ses premières explorations d’hydrocarbures en Méditerranée.
Déterminé à tout faire pour poursuivre les explorations d’hydrocarbures au large de ses côtes, Beyrouth s’est empressé de réagir au niveau diplomatique en saisissant de nouveau les Nations unies de cette affaire. Le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a ainsi adressé un mémorandum au secrétaire général de l’ONU, António Guterres, dans lequel il lui fait part des inquiétudes libanaises quant aux menaces israéliennes, que le chef de la diplomatie a considérées comme étant « illégitimes » parce que Tel-Aviv, a-t-il dit, « revendique un droit souverain sur un bloc qui ne lui appartient pas ». M. Bassil a en outre indiqué dans le document qu’Israël « se doit de respecter la charte de l’ONU et s’abstenir de menacer le Liban d’un recours à la force militaire ». Il a dans le même temps affirmé « le droit du Liban à défendre, par tous les moyens possibles, son territoire et ses intérêts économiques légitimes et documentés, en cas d’agression ».
Le chef de la diplomatie a, dans le même temps, défendu la souveraineté territoriale libanaise sur le bloc 9, qui jouxte la Zone exclusive économique israélienne, en se référant aux dispositions de la convention des Nations unies sur le droit de la mer (16 novembre 1994) relative au tracé des frontières maritimes. Israël, qui convoite une partie de ce bloc au cœur des tensions entre les deux pays à cause de son fort potentiel géologique, avait également saisi les Nations unies de ce même dossier. Le 21 décembre 2017, il avait adressé un mémorandum au secrétaire général de l’ONU pour contester les revendications libanaises, arguant du fait que le bloc 9 tombe sous la juridiction israélienne.
De sources diplomatiques, on souligne la difficulté, pour les Nations unies, de régler ce litige territorial, Israël, contrairement au Liban, ayant refusé que la Finul maritime s’occupe du tracé des frontières maritimes entre les deux pays. L’ONU ne peut s’acquitter d’une telle tâche qu’avec l’accord des deux parties concernées, ce qui n’est pas le cas concernant le conflit autour du bloc 9.
De mêmes sources, on met l’accent sur la nécessité, pour ce faire, d’une médiation américaine. Sous le mandat de l’ancien président américain, Barack Obama, Washington avait nommé un médiateur qui avait pour mission d’aider le Liban et Israël à tracer leur frontière maritime. Mais le mandat de celui-ci n’a pas été renouvelé avec l’avènement de l’administration Trump. Au Liban, on se veut néanmoins confiants quant à une intervention américaine, dans la mesure où les États-Unis prévoient, dans le cadre de leur projet de rééquipement de l’armée libanaise, un programme visant à consolider les forces navales libanaises, étant donné l’importance des missions qui attendent celles-ci, notamment la protection des frontières maritimes avec Israël, une fois que l’exploration d’hydrocarbures commencera offshore, ainsi que la lutte contre le trafic d’armes dans les eaux territoriales libanaises.