Si Nicolas Sarkozy mais aussi David Cameron et Hilary Clinton – respectivement à l’époque président français, Premier ministre britannique et secrétaire d’Etat des Etats-Unis – ont pu s’offrir, en 2011, en plein Printemps arabe, des séjours en Libye avec en prime des bains de foule fortement médiatisés dans une mise en scène grotesque, c’est parce qu’ils étaient sous l’entière protection de groupes terroristes qui assuraient leur sécurité.
C’est ce que vient de révéler le journal britannique The Telegraph, citant un certain Ismail Kamouka, employé à l’ambassade de Libye – connu pour son appartenance au Groupe islamique combattant libyen (GICL) dirigé par Abdelhakim Belhadj – qui a fait partie de l’équipe chargée de la protection des dirigeants occidentaux Sarkozy, Cameron et Mme Clinton au cours de leurs visites en Libye en 2011.
L’organisation de ces visites, surtout dans leur aspect sécuritaire, a exigé, de toute évidence, une collaboration étroite entre les services de renseignement français, britanniques et américains et le GICL, classé groupe terroriste mais dont les membres étaient «dignes de confiance» puisque chargés de la protection de Sarkozy, Cameron et Mme Clinton. Le scandale vient du fait que ce GICL, interdit au Royaume-Uni en 2005, est impliqué dans l’attentat-suicide revendiqué par Daech, commis le 22 mai 2017 à Manchester, à la sortie d’un concert de la chanteuse pop Ariana Grande, qui avait fait 22 morts, dont des enfants, et 116 blessés.
La presse londonienne a rappelé qu’en 2007, trois hommes, qui avaient plaidé coupable de soutien logistique et financier au GICL, avaient été condamnés par un juge britannique à des peines allant de 22 mois à 45 mois d’emprisonnement. A l’époque, les perquisitions effectuées dans les domiciles de ces trois mis en cause ont établi qu’ils étaient en liaison avec un groupe terroriste opérant en Algérie. Parmi eux, il y avait Ismail Kamouka qui a écopé de la peine la plus lourde : trois ans et neuf mois d’emprisonnement. Et c’est ce terroriste qui a fait partie de la garde rapprochée de Sarkozy, Cameron et Mme Clinton lors de leurs visites en Libye en 2011, au moment où l’Otan préparait l’assassinat de Mouammar Kadhafi.
L’itinéraire d’Ismail Kamouka, retracé par la presse britannique, ressemble à celui de tous les terroristes que les services de renseignement occidentaux ont récupérés et enrôlés pour être manipulés et lancés dans des actions de déstabilisation de leurs pays d’origine. Ismail Kamouka, islamiste opposant à Mouammar Kadhafi, a adhéré au GICL puis est parti en Afghanistan, à la fin des années 1980, où il a reçu une formation militaire avant de s’exiler en Grande-Bretagne, en 1994, avec le statut de réfugié politique ; il a ensuite obtenu la nationalité britannique. En 2011, il est retourné en Libye avec Abdelhakim Belhadj et d’autres «exilés libyens», terroristes notoires, pour faire la guerre à Mouammar Kadhafi, puis devenir responsables du service chargé de la sécurité des représentations diplomatiques à Tripoli et des visites de diplomates occidentaux en Libye.
Ismail Kamouka – terroriste notoire de l’avis de la presse britannique –, qui n’a jamais caché ses liens avec l’organisation des Frères musulmans soutenue par Qatar, se retrouve depuis 2014 en poste diplomatique à Londres. On comprend le choc provoqué dans l’opinion publique britannique quand elle a appris que ceux qui ont commis l’odieux attentat de Manchester – et qui se préparent sans aucun doute à frapper à nouveau de paisibles gens, dont des enfants, sans que personne ne puisse savoir où et quand – ont été d’«honorables correspondants» de leurs propres services de renseignement.
Houari Achouri