Alors que le pillage de sites historiques bat son plein en Syrie, les trafiquants ne parviennent pas toujours à s’emparer d’objets rares. Pour satisfaire la demande de collectionneurs occidentaux, ils se sont lancés dans la confection de répliques.
Des livres anciens de magie noire qui relatent différents sors et malédictions, des bibles sous couverture de cuivre, des œuvres religieuses de l’époque des croisades… Autant de vestiges du passé qui se trouvent aujourd’hui sous scellé au musée national de Damas.
Sauf qu’en réalité, ces précieuses reliques sont des copies soigneusement élaborées par des trafiquants érudits dans des laboratoires clandestins à Damas, Alep ou ailleurs en Syrie.
Des «faux» qui inondent, depuis 2015, le marché occidental, tant ils sont convoités par de naïfs collectionneurs persuadés que le pillage de temples et de sites historiques est une occasion immanquable pour s’emparer de reliques rarissimes sans être inquiété par les autorités.
«Le trafic a commencé à s’étendre en février 2015», a expliqué le Docteur Maamoun AbdulKarim, directeur général des antiquités et des musées de Damas à The Independent. Et d’ajouter : «Les pillards ont déjà attaqué tous les sites antiques en 2013 et 2014, mais, ne parvenant pas à s’emparer de tous les objets qu’ils convoitaient, ils se sont lancé dans la confection de faux.»
Et l’activité semble être particulièrement bien organisée. En effet, l’artisanat a toujours fait partie de la tradition syrienne et le pays regorge d’experts en la matière, archéologues et antiquaires, qui, plombés par le chômage sont prêts à collaborer avec les faussaires pour gagner de quoi vivre.
Les résultats sont souvent très convaincants. Par exemple, dans la province d’Idlib, contrôlée par les rebelles, la spécialité des faussaires est la confection de répliques de mosaïques romaines et grecques, qui sont ré-inhumés dans des sites anciens pour faire croire en leur authenticité. Souvent, le naïf collectionneur se verra même fournir une vidéo des «fouilles» comme preuve.
Si certaines répliques peuvent être rapidement découvertes par les spécialistes, d’autres sont si habilement réalisées que seule une analyse précise en laboratoire permet de prouver qu’il s’agit de faux. Parfois, vraies et fausses reliques sont mélangées afin de rendre la détection plus difficile.
Selon le docteur Abdulkarim, 80% des antiquités qui passent au Liban en provenance de Syrie sont des faux. Par ailleurs, passeurs et contrebandiers ne craignent plus les autorités, puisqu’en cas de saisie des reliques, la preuve qu’il s’agit de faux et non d’objets authentiques appartenant à l’héritage historique du pays leur vaut immédiatement une réduction de peine.
Depuis l’émergence de l’organisation terroriste Etat islamique en Syrie et en Irak, ses combattants ravagent temples et vestiges du passé pré-islamique. La ville antique de Palmyre, dont les temples sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco, est notamment devenue le symbole des attaques de Daesh contre l’héritage architectural et culturel de la région.
La ville, qui avait été conquise par Daesh en mai 2015, a été reprise par l’armée du gouvernement syrien soutenue par l’aviation russe le 27 mars 2016. Peu avant, le 5 mars, le célèbre chef d’orchestre Valeri Guerguiev a dirigé un concert à Palmyre pour soutenir sa restauration et rendre hommage aux victimes de la guerre syrienne