RT : Douze heures de négociations n’ont pas permis de trouver un accord officiel. Peut-on espérer que les tierces parties pourront trouver à Genève une solution au conflit en Syrie ?
Richard Black (R. B.) : C’est une tâche assez difficile parce qu’une bataille énorme se déroule maintenant pour Alep. L’armée syrienne, avec l’aide de la Russie et de l’Iran, a réussi à installer un cordon de sécurité vers la poche d’Alep et à piéger Al-Qaïda dans cette poche. Mais ce qui incite vraiment à des négociations de paix, ce sont les préoccupations des Etats-Unis et de la Turquie par rapport au fait qu’Al-Qaïda ait été encerclé et que l’armée syrienne a obtenu des résultats considérables dans la zone de Damas. Je pense que les évènements qui se sont produit sur le champ de bataille ont encouragé le processus diplomatique. La Turquie, qui a été un allié de Daesh, a envahi la ville syrienne de Jerablus, ce qui constitue un acte d’agression d’après les standards de l’ONU. Du coup, pour trouver une solution politique, il faudra que le gouvernement syrien et les Turcs soient impliqués.
Les Etats-Unis assurent qu’il y a des terroristes modérés, alors que la Russie comprend clairement qu’ils n’existent pas, que ce sont les mêmes groupes
RT : Quelles sont, d’après vous, les perspectives du processus de paix, compte tenu du problème des soi-disant «rebelles modérés» ?
R. B. : Le problème est que la diplomatie américaine a toujours défendu l’idée qu’il existe des terroristes modérés et qu’il faut faire la différence entre eux et le Front Al-Nosra. Ils font tous partie d’un groupe nommé l’Armée de la conquête fondé en 2015 par l’Arabie saoudite et la Turquie, qui est sous le commandement général du Front Al-Nosra. Nous avons donc des groupes terroristes très violents comme Jaysh al-Islam, Noureddine al-Zenki, que nous qualifions de modérés mais en fait, ils sont identiques au Front Al-Nosra. Il est donc extrêmement difficile de voir la différence.
C’est un peu une fantaisie : les Etats-Unis assurent qu’il y a des terroristes modérés, alors que la Russie comprend clairement qu’ils n’existent pas, que ce sont les mêmes groupes et que la seule chose qui change c’est leur nom. Ils font tous partie d’une armée terroriste.
Le secrétaire Kerry croit toujours au mythe selon lequel il y aurait de «bons» et de «mauvais» rebelles
RT : John Kerry et Sergueï Lavrov sont tous les deux d’accord que la solution de ce problème doit être politique et pas militaire. Peut-on s’attendre à un changement de stratégie sur le terrain ?
R. B. : Je pense que plus vite la situation d’Alep sera réglée et mieux ce sera. Les terroristes ont perdu plusieurs offensives récemment. Ils deviennent de plus en plus faibles dans la poche d’Alep. J’espère que, si les résultats de l’élection présidentielle sont bons, nous pourrons nous libérer du terrorisme. Maintenant il faut tenir compte des réalités, alors que le secrétaire Kerry, à mon avis, croit toujours au mythe selon lequel il y aurait de «bons» et de «mauvais» rebelles, l’agence du renseignement de la Défense (DIA) a déclaré que ce n’était pas vrai, que les modérés n’existent pas, qu’ils sont tous terroristes. Il s’agit d’informations classifiées qui ont fuité. Je pense qu’en fin de compte on arrivera à une sorte de solution politique