Dans un pays très permissif quant au financement des campagnes, l’approche des législatives dope le marché de l’entretien politique ou de la retransmission de meetings.
L’approche des élections législatives au Liban, programmées dimanche 6 mai, ne réjouit pas seulement les citoyens désireux de faire entendre leurs voix après neuf années sans scrutin. Elle ravit aussi les patrons des chaînes de télévision privées, impatients de renflouer leurs caisses, vidées par la baisse des rentrées publicitaires. Au pays du Cèdre, les médias audiovisuels monnayent en effet sans complexe les apparitions des candidats sur leurs antennes.
Qu’il s’agisse de clips promotionnels, d’entretiens en plateau ou de retransmission de meetings, tout est facturé, à un tarif qui va crescendo à mesure que se rapproche le jour du vote. Entre le début et la fin du mois d’avril, le prix de la minute d’antenne est ainsi passé d’environ 1 000 dollars à 6 000 dollars (de 830 euros à 5 000 euros).
Pour un passage dans une émission matinale, selon des témoignages convergents de candidats, il faut débourser entre 50 000 et 75 000 dollars. Pour les talk-shows de la soirée, programmes phares de la télévision libanaise, comme « Kalam Ennass » sur la chaîne LBCI ou « Da Jarass », sur MTV, il peut en coûter jusqu’à 250 000 dollars.
« Trop cher pour nous »
« Je connais un candidat qui s’est offert un package à un million de dollars, mêlant publicités et invitations dans des émissions en prime time », témoigne Paula Yacoubian, une ancienne présentatrice de télévision, candidate à Beyrouth sur la liste de la société civile Kulluna Watani. « Une chaîne nous a proposé un forfait à 2 millions de dollars, qui aurait permis de faire passer à l’écran nos 66 candidats, ajoute Lucien Bourjeily, qui concourt sur la même plateforme. C’était beaucoup trop cher pour nous, on a dû refuser. »
L’Etat ne remboursant pas les dépenses de campagne, ce système favorise les candidats fortunés au détriment des plus modestes. Il contribue à entretenir la domination de quelques castes politiques, comme les grandes familles, les hommes d’affaires…